Politique

ISF, et si on supprimait les impôts?

LES GESTICULATIONS FISCALES

Depuis des semaines tous les journaux bruissent d’informations diverses autour d’une réforme fiscale sur le patrimoine et les revenus du patrimoine. Va-t-on ou ne va-t-on pas supprimer l’ISF ? Les dernières nouvelles annoncent une modération de cet impôt mais avec la création d’un impôt nouveau : l’IRF. Le tout se passe dans une atmosphère irrespirable d’usine à gaz, comme si des impôts nouveaux pouvaient créer du gaz là où il n’existe pas.
Personne ne peut imaginer l’intensité de la ruine imposée à tous les entreprenants du pays par ces inondations de lois auxquelles s’ajoutent les variations permanentes dans la loi et les annonces de ces variations ; chacun est alors obligé de s’adapter à des éventualités dont personne ne sait si elles arriveront. L’inondation de lois est comme une marée noire où la vitalité du pays vient s’engluer.
La seule question qui vaudrait la peine d’être annoncée c’est-à-dire la réduction massive des dépenses publiques est un sujet tabou dont personne ne parle, sauf pour l’évoquer en vitesse, les prédateurs publics se contentant d’en rire sous cape.
Toute cette agitation autour de la fiscalité du patrimoine se résume à des gesticulations politiques et n’empêche pas de voir filtrer dans les mêmes journaux par divers échos le crime silencieux des impôts locaux en folie.

LA TAXE PROFESSIONNELLE

C’est l’occasion de rappeler une autre gesticulation, à savoir la suppression inattendue et par une sorte de coup d’état fiscal de la taxe professionnelle. Un beau jour en 2009 notre bien-aimé leader sans avoir prévenu personne a brusquement annoncé la disparition de cette taxe en 2010. Le budget de cet exercice comporte à cet égard 235 pages avec 1257 alinéas !
L’enfer fiscal français, alimenté largement au feu de l’imagination débordante de Bercy, est toujours pavé de bonnes intentions. Apparemment, en effet, la suppression de la taxe professionnelle serait justifiée puisqu’elle frappait principalement les investissements, sources de richesse future, et qu’à ce titre elle pourrait sauver les entreprises et freiner les délocalisations.
Cette considération est mensongère, car cette taxe n’est pas la seule à nuire aux entreprises et tous les impôts sont mauvais. Ceux qui remplacent la taxe sont meurtriers comme d’autres, soit directement quand les entreprises les paient, sont indirectement quand ce sont leurs clients ou leur personnel qui les supportent.
Dès l’annonce de l’événement, les courtisans se sont activés de multiples manières. Les uns, pour ne pas être en retard dans la flagornerie, ont salué le prétendu génie de la mesure. Les autres ont dû dans la hâte actionner leurs méninges pour imaginer comment remplacer cet impôt qui finançait 50 % des budgets des collectivités locales. L’évènement est intervenu au moment où l’on s’occupait du millefeuille des ces collectivités. L’embrouillamini introduit par la perspective du changement dans les collectivités s’est donc entremêlé avec celui qui provenait de la suppression de la taxe professionnelle.
Les phrases idiotes ont fleuri : nous savons que, s’il détruit les industries, le dirigisme est expert dans la fabrication de telles phrases ; un énarque a dit : « la suppression de la taxe professionnelle assure l’avenir de la France » (sic et resic). Un politique a renchérit : « Cette mesure sera un accélérateur de la sortie de crise ». !
LES COLLECTIVITES LOCALES

Des promesses mensongères ont été tout aussitôt lancées dans le public : les ressources perdues par les collectivités locales seraient retrouvées à l’équivalent par la création de nouvelles taxes ou par des transferts étatiques. C’est une promesse structurellement mensongère car, dans les usines à gaz incroyables du système fiscal français, personne ne sait jamais où va exactement l’argent et d’où il vient, ceci malgré tous les jeux d’ordinateurs possibles.
Depuis lors l’imagination fiscale s’est développée comme prévu en majesté et une kyrielle d’impôts nouveau a été créée. La tête de pont est la contribution économique territoriale (CET). Elle comprend la cotisation foncière des entreprises (CFE), qui reprend une grande partie des dispositions qui étaient applicables jusqu’à maintenant à la taxe professionnelle, et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui remplace la cotisation minimale de taxe professionnelle. Chacune de ces cotisations est soumise à des règles différentes !
La somme de ces deux cotisations correspond au montant global de la contribution économique territoriale à payer par l’entreprise, qui peut faire ensuite l’objet d’une réduction au titre du plafonnement de la valeur ajoutée et de la réduction temporaire pour accroissement de taxe pour les entreprises qui existaient déjà avant 2010.
Les usines à gaz prolifèrent décidément comme du chiendent et elles influent nécessairement sur les délocalisations d’entreprises.
Avec la disparition de la taxe professionnelle se profilait d’une façon dramatique l’équilibre des finances des collectivités locales.

SUPPRESSION DES DEPENSES

Si les acteurs au sommet avaient supprimé des dépenses étatiques avec en premier lieu les dépenses les concernant personnellement ils auraient pu conseiller fortement dans cette occurrence aux dirigeants des collectivités locales de faire de même. Supprimer les dépenses c’eût été d’abord supprimer les montants extravagants qui profitent à ces élus et aux dirigeants de ces collectivités ; il aurait aussi fallu tailler dans le vif de leurs activités soit inutiles soit faisant double ou triple emploi avec d’autres. Le sinistre méfait aurait pu ainsi se transformer en bienfait. L’exemple nécessaire ne venant pas du sommet, les collectivités locales ont été tout simplement conduites à trouver d’autres ressources sans ralentir en rien leurs dépenses à la grande joie des élus et de leurs bureaucratie.
Rappelons, que ces collectivités locales, dont l’importance s’est considérablement accrue suite aux deux décentralisations, sont largement à l’origine de la paupérisation de la France.
Un point important est à signaler avant de conclure ce point n’étant jamais mis en lumière. Il est parfaitement vain de parler de simple réduction des dépenses publiques et de simple réduction de la fiscalité. Ces objectifs sont parfaitement impossibles à atteindre dans l’état d’esprit des politiques au sommet et cela s’inscrit dans les échecs successifs des projets de réforme de l’État. A supposer qu’après des palabres interminables et des délais insupportables il puisse y avoir un résultat celui-ci serait minime. En outre si l’on parle, dans les deux cas, de simple réduction, on laisse en place la souche dont les rejets vénéneux repousseront très vite.

UNE FEUILLE DE ROUTE

Un pouvoir « Libérateur » finira bien par arriver un jour sous les décombres du désastre français. La feuille de route comporterait une direction impérative : suppression immédiate et complète de certains impôts particulièrement meurtriers et de beaucoup de dépenses notablement idiotes. Les dépenses supprimées devront dépasser le montant des impôts supprimés afin de conduire, avec d’autres éléments, à une régression de la dette.
La suppression totale des impôts signifie la disparition des déclarations, des réglementations, des bureaux, du personnel nécessaire et des contentieux. Celle des dépenses conduit aussi à la disparition de l’appareil d’État correspondant, avec en plus celle de l’effet négatif propre à une foule de dépenses inutiles.
Le public, à tous les niveaux de la société, ne pourra qu’applaudir dès lors qu’il retrouvera très vite, grâce aux impôts supprimés et dans son niveau de vie, de l’argent dont il avait perdu le souvenir.

Michel de Poncins